Les « benchmarks » interdits dans l’organisation du travail?

Nous reproduisons ci-dessous un communiqué du syndicat Sud BPCE (Banque Populaire Caisse d’Epargne) à propos d’une décision judiciaire récente.

Sud BPCE fait condamner la Caisse d’Epargne de Rhône-Alpes et fait interdire son organisation du travail reposant sur le benchmark

Quelques semaines après avoir obtenu de la Cour de cassation la recevabilité de Sud BPCE dans sa constitution de partie civile contre la nomination de François Pérol à la tête de BPCE pour chef de prise illégale d’intérêts, Sud BPCE et ses avocats Stéphane Ducrocq et François Dumoulin viennent d’obtenir une nouvelle victoire dans leur lutte indéfectible pour défendre les salariés et faire avancer le droit.

Les faits : Le 10 mars 2011, le syndicat Sud BPCE a assigné la Caisse d’Epargne Rhône-Alpes (CERA) devant le Tribunal de Grande Instance de Lyon pour faire interdire l’organisation du travail mise en place dans cette caisse à l’initiative d’Olivier Klein (aujourd’hui membre du directoire de BPCE), notamment le système du benchmark qui porte gravement atteinte à la santé des salariés.
Le benchmark est un système de gestion des performances du personnel particulièrement contraignant car il consiste en une évaluation permanente qui met en concurrence les agences et les commerciaux dont les résultats sont comparés à chaque instant.

Pour motiver sa décision, le juge a pris en compte les éléments apportés par Sud à l’appui de sa demande : la dizaine de rapports d’alerte des médecins du travail ainsi que les multiples critiques factuelles et concordantes émanant de l’Inspection du Travail, du cabinet ARAVIS chargé d’une expertise, des assistantes sociales, du CHSCT (Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions du Travail) et des autres instances représentatives du personnel.

Toutes ces critiques s’accordaient pour dénoncer les multiples effets particulièrement pernicieux et dommageables résultant de l’organisation du travail mise en place par les patrons : une atteinte à la dignité, un sentiment d’instabilité, une culpabilisation permanente, un sentiment de honte, une incitation pernicieuse à passer outre la réglementation et une multiplication de troubles physiques et mentaux constatés chez les salariés.

Le juge a rejeté les arguments des patrons en considérant que les mesures mises en place par eux étaient largement insuffisantes pour répondre à la problématique du benchmark. Le TGI a considéré que « l’employeur n’a pas respecté l’obligation de résultat qui pèse sur lui, qu’en instaurant comme mode d’organisation du travail le benchmark, il compromet gravement la santé de ses salariés. » Le juge relève également « qu’outre le stress qu’un tel système provoque, il entraîne des pratiques abusives faisant passer la
performance avant la satisfaction de la clientèle. »

La décision rendue le 4 septembre 2012 par le Tribunal de Grande Instance de Lyon est sans équivoque et donne raison à Sud BPCE sur toute la ligne. Le TGI
«
– Dit et juge que l’organisation collective du travail basée sur le benchmark compromet gravement la santé des salariés de la CERA et contrevient aux dispositions de l’article L 4121-1 et suivants du code du travail,
-Fait défense à la CERA d’avoir recours à une organisation du travail fondée sur le benchmark sans astreinte »…

Cette décision est très importante car elle impose l’interdiction d’une organisation du travail basée sur le benchmark non seulement à la Caisse d’Epargne Rhône-Alpes, mais dans les autres Caisses d’épargne puisqu’elles utilisent les mêmes méthodes. Plus largement, au-delà du seul Groupe BPCE, cette décision est de nature d’ores et déjà de fonder des actions de la part de salariés et de leurs représentants dans d’autres entreprises pour faire interdire des organisations de travail reposant sur des méthodes et des pratiques identiques.
Cette éclatante victoire apporte une nouvelle fois la preuve du bienfondé du mot d’ordre de Solidaires et de Sud BPCE « Les droits des salariés contre la loi des patrons » !

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