9e anniversaire de Fukushima

A l’heure du Coronavirus, le 9e anniversaire de la catastrophe nucléaire de Fukushima est passé inaperçu, tandis que le gouvernement japonais construit inlassablement l’invisibilité des conséquences sanitaires gravissimes de la contamination radioactive toujours à l’oeuvre dans la région de Fukushima et au delà. En mars 2011, j’avais écrit une tribune dans le Monde qui me semble plus que jamais d’actualité (pj) : la contamination radioactive chronique de nos sociétés nucléarisées contribue à l’épidémie mortelle de cancer en toute invisibilité, qui, en France, actuellement, représente 400 000 nouveaux cas et 150 000 décès par an. L’absence de registre départementaux de cancer empêche toute analyse du rôle de la radioactivité dans cette épidémie.Comme une forme de provocation, à l’ouverture des jeux olympiques de Tokyo, la flamme olympique  pourrait partir de Fukushima, consacrant l’effacement des traces des conséquences mortifères de la radioactivité sur la population japonaise. Un mouvement citoyen de protestation a manifesté devant le Comité International Olympique contre les JO de Tokyo à Lausanne, le 26 février 2020  (voir la déclaration en pj). Si les autorités japonaises et internationales étaient amenées à annuler les JO de Tokyo, ce serait non pas en raison des dangers de la radioactivité, toujours présente, mais du coronavirus qui pourtant tue infiniment moins que les maladies radio-induites, dont les cancers.Pourtant, l’expérience biélorusse, ukrainienne et russe de cette autre catastrophe nucléaire, Tchernobyl,  a permis aux scientifiques et médecins indépendants du lobby nucléaire, depuis 1986, de recenser les conséquences sanitaires et de tenter de les faire connaître. En particulier, Alexey V. Yaboklov, Biologiste, Académie des Sciences de Russie, Vassili B. Nestenreko, physicien, membre de l’Académie des sciences du Bélarus, Natalia E. Preobrajenskaya, biologiste, membre du Conseil Social du Ministère Ukrainien de la santé, ont rassemblé et mis à jour jusqu’en 2015, les milliers de publications concernant les atteintes à la santé liées à l’accident de Tchernobyl, concernant des centaines de milliers de victimes dans les trois pays. Ces travaux ont été traduits en anglais et publiés en 2009 par l’Académie des Sciences de New York, puis traduits en français par une association en lutte pour l’indépendance de l’OMS par rapport à l’AIEA sur les effets sanitaires du nucléaire (http://independentwho.org/fr/ ). Les chercheurs précédemment cités écrivaient en 2015 : « Pas moins de 3 milliards de personnes vivent dans des zones contaminées par des radionucléides de Tchernobyl », mais les conséquences sanitaires ne font l’objet d’aucune surveillance médicale et épidémiologique digne de ce nom.  Tchernobyl a fait l’objet d’une série regardée par des millions de personnes. L’article de Suzie Greaves, Tchernobyl : la dette de vérité, paru en anglais dans The Ecologist, (et traduit en Français par Virginie Dupeyroux), réagit avec force à l’effacement des traces contenu dans le film de Craig Mazin, tout en rendant hommage au livre de Wladimir Tchertkoff qui désigne par son nom ce qui s’est passé depuis le 26 avril 1986 : le crime de Tchernobyl. Car c’est bien de cela qu’il s’agit.(PJ)A l’occasion de ce 9e anniversaire de la catastrophe nucléaire japonaise, le communiqué de la CRIIRAD Fukushima : le mythe du retour à la normale, met aussi l’accent sur l’invisibilité socialement construite de la radioactivité et de ses conséquences sanitaires : http://www.criirad.org/actualites/dossier2020/2020-03-10-CP_Fukushima_long.pdf?utm_source=sendinblue&utm_campaign=Communiqu_de_presse_-_Fukushima__le_mythe_du_retour__la_normale_-_Envoi_Adhrents&utm_medium=email . Prenez le temps de regarder le film dont le lien figure dans le communiqué : Invisibles retombées.
La crise mondiale provoquée par l’irruption du coronavirus sert aussi l’oubli des atteintes à la vie dues à l’industrie nucléaire, civile et militaire. Les mesures prises contre le virus témoignent, a contrario, de l’indifférence coupable de toutes les autorités, nationales, européennes et mondiales, à l’égard des millions de victimes de la radioactivité.Annie Thébaud-Mony, 11 mars 2020

Autres liens :
Fukushima, JO et Coronavirus
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